LYON-TURIN, DÉMOCRATIQUE ?
Le débat public n'a jamais eu lieu
Concernant le Lyon-Turin, le débat public tel qu'il est prévu par la loi n'a jamais été organisé. La seule concertation a eu lieu en 1993, mais à l'époque on parlait d'un projet très différent du projet présenté à l'enquête publique de 2012.
Un simulacre d'enquête publique
L'enquête publique du Lyon-Turin a eu lieu en 2012. En guise d'enquête publique, ce fut une mascarade : dossier de 5 000 pages consultable seulement aux heures d'ouverture des mairies, présentation de présentations fantaisistes, illisibilité de certains documents, absence de réponses aux questions posées par le public... sans oublier les conflits d'intérêts impliquant certains enquêteurs. Les conclusions de l'enquête publique étaient écrites à l'avance.
Lire à ce sujet l'article du 6 novembre 2014 dans Libération.
Un projet infiltré par la mafia
En 2011, des dirigeants de Lyon-Turin Ferroviaire ont été condamnés par le tribunal de Turin pour trucage d'appels d'offres. Certaines entreprises ayant travaillé sur le chantier italien ont des liens avec la "Ndrangheta", une organisation mafieuse calabraise. Les implications sont celles d'une organisation criminelle: marchés truqués, fournitures non conformes aux commandes, surcoûts inexplicables en équipements mobilier et informatique, entraves à la concurrence.
En octobre 2014, la société Lyon-Turin Ferroviaire a été nominée aux prix Pinocchio dans la catégorie "Mains sales, poches pleines".
En février 2015, l'OLAF (Office européen de Lutte Anti Fraude) a ouvert une enquête sur le Lyon-Turin.
Les instances de contrôle ne sont pas écoutée
La Cour des Comptes a tiré à plusieurs reprises la sonnette d'alarme au sujet du projet Lyon-Turin. Dans son référé sur le projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin du 1er aout 2012, elle critique le pilotage du projet qui "ne répond pas aux exigences de rigueur nécessaires dans la conduite d'un projet d'infrastructure de cette ampleur et de cette complexité". Elle s'alarme de "coûts prévisionnels en forte augmentation", de "prévisions de trafic revues à la baisse", d'une "faible rentabilité socio-économique", du "financement non défini". Lire à cet effet l'article des Echos du 31 décembre 2012.
Dans son dernier rapport intitulé "La grande vitesse ferroviaire, un modèle porté au delà de sa pertinence", la Cour des Comptes émet à nouveau des doutes sévères sur le Lyon-Turin, dénonçant sa faible rentabilité, la forte hausse des coûts prévisionnels, ainsi que les prévisions de trafic revues à la baisse.
La Commission Mobilité 21, dans son rapport de juin 2013 destiné à évaluer et hiérarchiser les grands projets d'infrastructures français, a relégué le Lyon-Turin en seconde priorité, le jugeant trop coûteux. N'ayant pas pu s'assurer que les risques de saturation qui justifient la réalisation du projet interviendraient avant les années 2035 à 2040, elle recommande de repousser sa réalisation entre 2030 et 2050.
Lire l'article du 4 septembre 2013 dans les Echos.
Malgré ces critiques de nos instances démocratiques, le projet continue d'avancer !
Un projet émaillé de conflits d'intérêt
La liste des conflits d'intérêt est longue et il serait fastidieux de tous les citer, nous vous renvoyons pour cela aux pages 88 à 130 du recours déposé au Conseil d'Etat le 21.02.2014 par plus de 1200 citoyens.
Les derniers en date:
- La certification du coût du projet est censée être faite par un tiers extérieur (article 18 du traité franco-italien), par "des experts n'ayant pas eu à travailler sur le dossier" et sans conflit d'intérêts (référé du 1er août 2012 de la Cour des Comptes), "de la manière la plus rigoureuse qui soit et de manière indépendante" (Jean-Marc Ayrault, 8 octobre 2012). Finalement, LTF/TELT a confié cette étude à son sous-traitant GDF SUEZ TRACTEBEL qui a déjà travaillé pour LTF de 2002 à 2006 et de 2009 à 2013, par un marché de gré à gré en violant ainsi les dispositions du traité franco-italien. On notera également au passage que GDF SUEZ est membre du Conseil d'Administration de l'IGD (Institut de la Gestion Déléguée, qui assure la promotion des fameux PPP, les "partenariats public-privé") présidé par Mr Hubert du Mesnil qui est également président de LTF/TELT...
- Le 14 avril 2015, Lyon-Turin Ferroviaire s'est déplacé à Bruxelles pour une nouvelle séance de communication, en faisant intervenir le "professeur Oliviero Bacelli de l'université de Bocconi", un "expert" qui a défendu la rentabilité socio-économique du projet. Ce que Lyon-Turin Ferroviaire/TELT a simplement omis de dire, c'est que l'expert en question est au Conseil d'Administration de LTF/TELT; qu'il est associé de la société Gruppo CLAS; que la société Gruppo CLAS a pour clients la société Transpadana (l'équivalent italien de la Transalpine) et aussi l'Université de Bocconi, tant qu'on y est. Quelle est la crédibilité de ce genre d'expert ?
Des conflits d'intérêt dans tous les sens !
Un forcing peu démocratique
Depuis 10 ans les promoteurs du Lyon-Turin mentent et modifient les règles pour vendre et réaliser à tout prix un projet devenu inutile.
Par exemple, la condition de la saturation de la ligne existante, présente dans les premiers documents officiels, a mystérieusement disparu.
Un lobbying forcené est mené par les promoteurs du projet à travers le "Comité pour la Transalpine", créé dans le but de "mener toute action de nature à faciliter ou accélérer la réalisation de la liaison ferroviaire Lyon-Turin".
Les promoteurs du projet multiplient les actions de communication tous azimuts vers le gouvernement, vers l'Union Européenne, dans la presse... En juin 2013, Lyon-Turin Ferroviaire lançait une opération de communication dans 10 quotidiens français et italiens, dont le prix a été estimé entre 350 000 et 500 000 €. Des millions d'Euros publics sont ainsi engloutis dans un lobbying forcené... qui se fait aux frais du contribuable ! Un projet justifié aurait-il besoin d'être autant défendu ?